Les résidents de la capitale française sont appelés à se prononcer dimanche sur une proposition de la Ville qui ferait augmenter du triple le prix du stationnement des véhicules utilitaires sport.
« Plus ou moins de VUS à Paris? » Sur les panneaux publicitaires, un peu partout à travers la capitale française, la question est posée simplement.
Dans les faits, dimanche, les Parisiens devront indiquer s’ils sont en faveur de la création d’un tarif spécifique pour les voitures individuelles lourdes, encombrantes et polluantes
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On fait ça d’abord pour la pollution et pour permettre à nos enfants d’être plus sûrs dans les rues
, déclarait vendredi la mairesse de Paris, Anne Hidalgo, aux abords d’une école parisienne où elle s’était déplacée, en compagnie de collaborateurs et de bénévoles, pour une ultime campagne de sensibilisation en vue du vote.
Si elle était adoptée, cette mesure ferait augmenter par trois le prix du stationnement pour les véhicules thermiques ou hybrides dont le poids dépasse 1,6 tonne, ou dont le poids est au-delà de 2 tonnes pour les véhicules électriques.
Selon les zones de stationnement, le taux passerait de 4 à 12 euros l’heure, ou de 6 à 18 euros l’heure, pour les voitures ciblées.
Ils [les VUS] occupent l'espace public et finalement ils l'occupent au même prix qu'un tout petit véhicule. Ça, ça ne marche pas, ce n'est pas possible.
Selon la Ville, le poids moyen d’un véhicule en France est passé de 975 kilos à 1233 kilos aujourd’hui.
Un symbole?
La mesure toucherait surtout les visiteurs et les travailleurs venant de la périphérie, puisque la politique ne serait pas appliquée aux résidents de Paris eux-mêmes lorsque leur véhicule se trouve dans leur zone de stationnement. Les commerçants, qui ont parfois besoin de véhicules plus gros pour exercer leur travail, seraient aussi exemptés.
Selon la ville, la politique toucherait environ 10 % des voitures que l’on retrouve stationnées aux abords des artères parisiennes.
Si le but est d’encourager la diminution d’émissions, la politique aurait aussi une portée symbolique, reconnaît Tony Renucci, directeur de l’association Respire, qui a milité en faveur de la mesure.
L’idée est d’envoyer un message aux constructeurs automobiles pour leur dire d’arrêter de privilégier les VUS dans la fabrication de véhicules neufs
, explique Tony Renucci. En ce sens, il croit qu’une décision prise dans une ville aussi importante que Paris peut avoir du poids.
Je pense aussi d'envoyer un message au pouvoir national et au gouvernement parce qu'aujourd'hui ils ne mettent pas en place les politiques qui permettraient de limiter l'usage des véhicules lourds et polluants.
La campagne ciblant les VUS s’inscrit par ailleurs dans une stratégie plus large de l’administration parisienne, constituée d’une alliance entre la mairesse socialiste Anne Hidalgo et des élus écologistes, pour réduire la circulation automobile dans la capitale.
Ainsi, au cours des dernières années, la Ville a par exemple multiplié la création de pistes cyclables et imposé une réduction de vitesse à 30 km/heure sur la plupart des artères de la capitale.
Selon un sondage mené pour le compte de l'organisme Respire, mené auprès de 1016 résidents, 61 % soutiendraient l’imposition d’une tarification de stationnement en fonction du poids.
Mais l’idée rencontre aussi de l’opposition.
Encore une fois, on a un soi-disant problème, on crée une taxe. C’est typiquement français
, déplore Yves Carra, porte-parole de l’association automobile Club Mobilités France.
Lui-même propriétaire d’un VUS hybride, il admet que ce type de véhicule connaît une grande popularité. Selon les données de la firme AAA Data, publiées dans le journal Le Parisien, le nombre de VUS aurait bondi de 60 % en quatre ans à Paris. Or, selon Yves Carra, si ces voitures se sont imposées sur les routes du pays, c’est parce qu’elles répondent aux besoins de certains Français.
On ne va pas acheter une voiture pour entrer dans Paris et une voiture pour circuler le week-end quand on en a besoin avec ses enfants ou quand on part en vacances.
Qu'il y ait moins de voitures sur la route, on est tous pour, parce que d'abord ça coûte cher et parce qu’on y passe du temps. Mais qu'est-ce qu'on propose comme autres solutions?
demande Yves Carra, qui dit privilégier le recours au covoiturage ou la création de stationnements incitatifs, plutôt qu’une approche punitive.
Aux abords de l’école primaire où la mairesse est venue défendre son projet, plusieurs parents, résidents de ces quartiers urbains, tendent l’oreille.
Ça pollue, ça prend trop de place
, lance Diane, qui croit toutefois qu’une alternative doit être offerte aux automobilistes que l’on souhaite décourager de venir dans la ville avec leurs VUS. Plus de transports en commun, et des transports moins chers
, précise-t-elle. La Parisienne a bien l’intention de se déplacer dimanche si elle le peut
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Le taux de participation pour ce genre de consultation est parfois très faible. Au printemps dernier, seuls 7,46 % des électeurs avaient voté sur une proposition visant à interdire les trottinettes électriques en libre-service à Paris.
Paris n’est pas la seule ville à imposer des frais plus élevés aux véhicules les plus lourds. En France, la Ville de Lyon s’apprête à introduire un système similaire cette année. À Montréal, depuis janvier, l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal détermine le prix des vignettes en fonction du poids des voitures.