Certaines élues de Sherbrooke se sont opposées à l'adoption de la nouvelle politique de toponymie qui vise à prioriser les femmes qui ont marqué l'histoire dans l'attribution de noms de rues.
Au Québec, sur 50 000 toponymes rappelant une personne, seulement 11 % désignent une femme.
Bénévole au Comité de toponymie de la Ville de Sherbrooke, David Lacoste admet qu'il est difficile de trouver un coin de rue avec deux noms de femmes qui représentaient la communauté de Sherbrooke
.
La bibliothèque Éva-Sénécal est l'endroit qu'il a choisi pour rencontrer notre journaliste. Il s'agit d'un lieu nommé en l'honneur de cette autrice, poétesse et journaliste originaire de Sherbrooke.
David Lacoste évoque des raisons historiques pour expliquer cet écart.
Si la femme était à la maison et l'homme sur la place publique, c'est l'homme qu'on a retenu et qui se retrouve avec un nom sur le coin d'une rue et non la femme en question.
Cette réalité, la Ville de Sherbrooke souhaite la changer. Cette idée lancée par Évelyne Beaudin lorsqu'elle était conseillère, en 2019, avait suscité un débat houleux. L'idée a toutefois fait son chemin.
La nouvelle politique de toponymie adoptée par la Ville vise maintenant à combler cet écart.
C'est une façon d'honorer nos racines, notre histoire. C'est pour ça que nous, ce qu'on disait, c'est qu'on devrait être fiers à Sherbrooke qu'on veuille combler l'écart entre autres pour les femmes, les Premières Nations, les communautés culturelles
, explique la conseillère municipale Laure Letarte-Lavoie.
Des élues sont en désaccord
Lors de l'adoption de cette nouvelle politique de toponymie, trois élues femmes ont enregistré leur dissidence. C'est le cas de la conseillère Nancy Robichaud, qui croit que le fait de prioriser les femmes n'était pas l'avenue à prendre.
Il y a des hommes qui ont fait de grandes choses, puis pourquoi eux n'auraient pas le droit? On s'entend que l'équité des femmes pour les noms de rues, ça va être long avant que ça arrive. Depuis deux ans, on construit quand même moins de maisons, il y a moins d'ouverture de rues
, fait valoir la conseillère Nancy Robichaud.
Selon Gabriel Martin, qui a coécrit un livre sur les femmes et la toponymie, combler l'écart est essentiel pour que des figures comme Sylvie Daigle ouvrent la voie pour d'autres femmes ou pour des personnes issues de minorités.
Parfois, la toponymie, ça a l'air abstrait. On se demande ce que représente ce débat, mais ça a un impact concret sur les jeunes filles, sur les femmes qui vont se dire : "je prends une place dans la société". On travaille tranquillement sur un imaginaire
, illustre l'auteur.
Même si la politique adoptée par la Ville ne fait pas l'unanimité, les citoyens doivent néanmoins s'attendre à voir davantage de noms de femmes apparaître dans les rues de la ville.
Avec les informations de Pierrick Pichette